Une terrible envie de vivre by Fagot-Campgna Anne

Une terrible envie de vivre by Fagot-Campgna Anne

Auteur:Fagot-Campgna Anne
La langue: eng
Format: epub
Éditeur: City Edition
Publié: 2020-08-13T16:32:34+00:00


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L’objet de la radiothérapie

La nouvelle étape de mon parcours de soins comprend le premier rendez-vous avec la radiothérapeute, suivi de trente-trois nouvelles cases à cocher en deux mois, je ne m’en doute pas encore. La radiothérapeute est installée au sous-sol de radiologie, dans une aile à découvrir. J’ai glissé mes étiquettes bleues dans la boîte située à côté de la porte de consultation, elles ont été ramassées. Nous sommes nombreuses à attendre sagement dans ce couloir en ce mois de juillet et la porte s’ouvre rarement. Je suis patiente et mon tour vient. La radiothérapeute est une femme aux cheveux longs et bruns, nattés, calme, qui me parle doucement et me sourit. Elle m’examine tout aussi doucement, ne trouve rien d’anormal à l’examen de cette cicatrice fraîche, et explique qu’elle fera deux doses. L’une sur l’ensemble de la zone à traiter, l’autre focalisée sur le lit du cancer. Mon cancer est à gauche, comme mon cœur qu’il ne faut pas trop exposer aux radiations. Ce qui reste du sein est petit, un sein d’adolescente bien redessiné. Elle préfère donc séparer les deux doses sur mon petit gabarit, ce qui fait plus de séances, trente-trois de cinq à dix minutes, cinq séances par semaine pendant sept semaines, s’il n’y a pas de panne ou de besoin de maintenance du matériel. Elle m’explique cela comme s’il lui fallait s’excuser.

Un rendez-vous de scanner de repérage m’est donné mi-juillet. Deux jeunes techniciennes papillonnent gaiement autour de moi, alors que je suis allongée sur un scanner qui semble dédié à ce repérage. À ma grande surprise, elles écrivent à même mon corps avec des marqueurs épais, joyeusement, en plaisantant. Tout le sein jusqu’en haut du thorax et sous l’aisselle est maintenant décoré de traits bleus, rouges, noirs, je suis devenue un sapin de Noël au mois de juillet ! Cela doit être temporaire, une farce des jeunes techniciennes ? Deuxième surprise, elles recouvrent de plastique chaque marquage ! Cela n’est plus temporaire ! Je n’ai jamais imaginé sept semaines de plastification ! Pour que les traces ne disparaissent pas à la douche, m’expliquent-elles. Le bain m’est toujours interdit. Les crèmes également. Ah, il y a une troisième surprise, un point de tatouage, immuable. On ne me demande pas mon avis, ça y est, ce point noir minuscule est imprimé dans mon corps sur mon sternum. Je ne suis pas préparée à cette étrange attaque. J’ai dû manquer un feuillet d’information…

Je commençais pourtant à être plus à l’aise avec mon corps, ma cicatrice, avec mon sein un peu abîmé mais sauvé comme le voulait la chirurgienne. Je regarde mon corps tous les matins, je le célèbre. Le plastique change considérablement la donne. Mon corps redevient étranger, je ne peux pas apprivoiser un sapin de Noël, je ne le regarde plus. Adieu les robes, les décolletés de l’été, je révise ma garde-robe le soir même. La moitié de mes tee-shirts, chemisiers ou robes laissent voir le plastique et un trait bleu sur le haut du thorax. Les hauts trop échancrés à l’aisselle sont aussi éliminés.



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